Maudite bête noire!
- Valérie Bidégaré
- 26 janv. 2021
- 3 min de lecture

Juste à regarder ton joli petit minois, je sais. Je sais que tu es tourmenté. Tu souris, pour la forme, de ce petit sourire forcé que je connais très bien. Instinct de maman, tu me diras, mais je sais que tu utilises ce sourire quand tu n’as qu’une envie, au fond de toi, et c’est de pleurer.
Généralement, dans les minutes qui suivent, c’est ce qui survient. Tu pleures, mais pas comme quand tu es tombé et que tu t’es éraflé le genou ou que l’un de tes frères y est allé un peu fort dans votre chamaille.
Non, tu pleures de détresse. Ça se voit dans ton regard. Ce mal sournois qui sommeille en toi, en moi, je sais tellement le reconnaître. Il se cache à l’intérieur et attend le moment opportun pour sortir de sa cachette et te frapper d'un grand coup. Puis, la panique s’installe. Elle se lit dans tes yeux. Pourquoi est-elle là? Oh, la première fois, elle a une bonne raison. Il nous arrive une situation un peu paniquante et on réagit normalement devant ce « danger », sauf que les fois suivantes, les raisons sont nombreuses et ne mettent pas nécessairement en péril notre santé ou notre vie. Sauf que, grands anxieux que nous sommes, ça on ne le sait pas. En fait, oui, on le sait, mais notre cerveau, lui, s’en balance.
Et puis ça déboule. On commence à sentir cette énorme boule dans notre estomac. Celle qui nous fait croire qu’on fait une crise de cœur, que notre dernière heure est arrivée ou encore qu’on va se vomir les tripes. On est agité, on pleure, on est fébrile et incapable de se calmer. On le veut vraiment. On souhaite du plus profond de notre cœur que ça parte, comme ça, en claquant des doigts, mais non, ça ne fonctionne pas comme ça. Exit la pensée magique quand on fait des crises d’angoisse ou de panique. En fait, plus on veut que cette angoisse, cette panique, quitte notre corps, plus elle se fait un malin plaisir à prendre de la place, à jouer avec nous. Un peu comme un enfant à qui tu dis d’arrêter de sauter sur le divan et qui redouble d’ardeur.
Si tu savais comme ça vient me chercher, mon cœur, de te voir comme ça. Parce que je sais que trop bien à quel point cette anxiété, cette angoisse, cette panique de merde te pourrit la vie. Ça me fait mal jusqu’au plus profond de mon être. Je te serre dans mes bras et j’ai l’impression de vivre, de ressentir tout ce qui traverse ton petit corps. Et je m’en veux. Terriblement. Parce que tu as hérité de ce côté de moi que je ne voulais tellement pas transmettre à mes enfants. Pourquoi? Pourtant, je fais attention devant vous. Jamais je ne flanche, ne cède à la panique en votre présence. Je me demande donc où ai-je échoué. Je m’auto flagelle. Maudite culpabilité de merde.
Puis, je me dis que ça va bien au-delà de cela. Il y a une part d’hérédité et je n’y peux rien. Ce que je peux faire, par contre, c’est de t’aider à cheminer à travers cela. T’aider à dompter cette petite bête noire beaucoup plus tôt dans ta vie que je n’ai pu le faire moi-même. T’aider à faire en sorte que ta vie soit plus douce, plus calme et moins angoissante que la mienne. Ça, je m’engage à le faire. Parce que je sais comment on se sent, du haut de nos 7 ans, lorsqu’on traverse nos premières crises de panique. C’est terrorisant. On ne comprend rien. On veut simplement que ça parte et que ça ne revienne jamais.
Ça va s’estomper, mon cœur, je te le promets. Ma mission, dans ces moments, est de te serrer dans mes bras, de me coucher près de toi et de sortir mon petit coffre à outils afin qu’on trouve LA solution pour que cette petite bête noire là retourne dans sa tanière et y reste.
Parfois, ça prend plusieurs essais. Ce n’est pas toujours facile, mais on finit par y arriver. Et, parfois, elle revient nous visiter sans crier gare sauf qu’on est capable de l’approcher et même de la flatter jusqu’à ce que, calmement, elle retourne se cacher.
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